La télé-réalité d’enfermement : « C’est tout pour le moment ? »

Les ateliers de Juliette
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Il y a maintenant douze ans, M6 lançait en France le tant redouté concept de la téléréalité d’enfermement avec son désormais légendaire Loft Story. Décriée par les sages de la télévision, adulée par les jeunes et la ménagère, l’émission fait grand bruit et au final, remporte un succès que n’importe quel analyste télé n’aurait pu imaginer. Ainsi, près de 12 millions de personnes assistent à la Victoire (OUI, avec un grand V, c’est historique quand même) de Loana et Christophe (Christophe qui ?) à 23h10, un score pratiquement jamais atteint depuis par la deuxième chaîne privée de France. On raconte même que les rédactions de toutes les chaînes françaises sont scotchées à leur poste au moment du sacre de la bimbo blonde qui avait excité et choqué les français par deux trois galipettes dans la piscine avec un certain Jean Edouard. Sur ce succès, la chaîne décide de réitérer l’exploit en lançant, avec un optimisme inébranlable, moins d’un an après, la deuxième saison du Loft. Si le lancement est un succès commercial non discutable, l’émission s’essouffle et tombe à 5.7 millions de téléspectateurs lors de la finale. Inutile de vous citer des noms de candidats, tout le monde s’en fou, soyons honnêtes. M6 ne renouvellera pas le programme pour une troisième saison.

DU LOFT AUX COPIES

Si M6 s’en ai mis plein les poches avec ses deux lofts, elle pense clairement avoir fait des envieux. Pas tant que ça finalement… TF1 est la seule chaîne à tenter le coup de la téléréalité façon Big Brother (le programme ayant inspiré ces formats français). 2003, la mode est à l’Europe. Tout va bien dans le meilleur des mondes, on est tellement content de ne plus avoir besoin de changer de monnaie quand on va d’un pays à l’autre. Ni une ni deux, TF1 mets 300.000 euros en jeu dans son loft européen : Nice People. Et pas de fouilles à la douane, n’est-ce pas pratique ? La chaîne y croît, le patron y croît, les analystes y croient (surtout à la vue du succès d’une autre émission de TF1, une certaine Star Academy qui attire jusqu’à 11 millions de français…) : tout le monde est en émoi devant le génie maléfique de TF1, 12 candidats de nationalité différentes vont se trémousser 24h24 devant des caméras. Et ça ne prend pas. Le lancement est timide pour l’époque (7 Millions, 35% PDA), et la finale, soyons francs, désastreuse (4.5 millions, 27% PDA). TF1 ne s’y brûlera plus, l’émission est allumée par la critique, descendue par les intellectuels (là où le Loft avait un « caractère social intéressant ») : résultat, pas de Nice People 2 (quelle tristesse… ou pas finalement). On croyait M6 réticente à la téléréalité, il n’en est rien. En avril 2004, la chaîne lance « Les colocataires » où filles et garçons sont séparés dans deux maisons. On ne s’éternise pas : lancement moyen, quotidiennes lamentables, prime décalé l’après midi tellement l’intérêt pour cette émission est nul. Les audiences montrent clairement un essoufflement des programmes du genre : la fin est-elle annoncée ?

LE RENOUVEAU SECRET STORY

Même si certains programmes de realtv de TF1 fonctionnent convenablement (La ferme célébrités ou autres Première Compagnie), l’exploit de rameuter les foules du Loft n’est pas réitéré. Car outre les audiences, le programme était rentré durablement dans la tête des français. Après le lendemain de la diffusion, qui ne s’est pas surpris en train de parler de la live-sextape de Loana autour d’un café avec ses collègues ? Eh bien ce genre de contact social autour d’un programme de télé réalité n’existait plus. Jusqu’en 2007, arrivée fracassante d’un nouveau programme sur TF1 produit par le monstre Endemol. La TNT commençant à éroder les parts d’audiences des chaînes historiques, TF1 a fait le pari de reconquérir un public plus jeune parti sur W9 ou autre NRJ12, avec un programme d’été rapidement devenu incontournable : Secret Story. En plus du format Big Brother toujours présent, chaque candidat a un secret… bref tout le monde connaît. Moyenne de 5 millions de fans pour la première saison pour 34.6% de PDA : avec l’avènement de la TNT, la chaîne est comblée par ces scores et renouvelle l’émission très rapidement, malgré les critiques. Car oui, « Secret » pour les intimes reste une émission de téléréalité d’enfermement et le genre n’a plus la cote auprès des français. Ce qu’on remarque au fil des années, comme nous le montre les audiences moyennes des saisons 1 à 7 : une érosion très significative.

En sept ans, le programme phare de l’été de TF1 a donc perdu plus de LA MOITIE de ses fans des débuts. Et même si les audiences globales sont basses, on note des performances incroyables sur les jeunes et les ménagères de moins de 50 ans, responsable des achats, prisée par les annonceurs, vous connaissez le topo (de 30 à 40% de PDM). D’où la confiance de TF1 dans ce programme : la saison 6 a rapporté pas loin de 60 millions d’euros à TF1, pour un coût estimé de 20 à 30 millions d’euros (soit une rentabilité pouvant atteindre 150 % !). Endemol peut donc se frotter les mains : même si les performances de la saison 7 sont moyennes, le programme rapporte tellement que la saison 8 doit d’ores et déjà être dans les tiroirs de TF1…

DOCU-RÉALITÉ, SCRIPTED RÉALITÉ, TÉLÉ RÉALITÉ… QUELLE RÉALITÉ POUR CES PROGRAMMES ?

Il va de soit qu’aucune chaîne du PAF ne se risquera à relancer un autre programme de téléréalité d’enfermement, et ce pour 2 raisons principales :

Des autres programmes tu créeras : comment ne pas passer à côté des Anges, des Marseillais, des Chtis, de l’île des vérités…, que nous pondent les chaînes de la TNT ? Ces nouveaux programmes (encore une fois d’inspiration US) foisonnent et font le bonheur de ces petites chaînes qui voient leur audience chez les jeunes exploser ! De plus ces programmes ont un coût insignifiant comparé au mastodonte qu’est Secret Story (pas de prime, pas de plateaux, pas de directs, pas de maison à construire, beaucoup moins de techniciens à payer…). Sans compter sur les merveilles télévisuelles que sont Tellement Vrai, ou autres émissions où des personnes viennent exposer leurs malheurs à la France entière. Pour résumer, Tellement vrai est à la télé ce que les 2Be3 étaient à la musique. Autre programme hautement novateur : les scripted reality, avec des acteurs à faire pâlir Jean Dujardin et Jean Pierre Marielle. A mettre au placard, définitivement.

Endemol tu ne copieras pas : NON, il ne faut surtout pas toucher à la boîte qui mange tout.Beaucoup s’y sont essayé, et beaucoup ont coulé. 2010 : W9 lance Dilemme, nouveau programme d’enfermement où, comme son nom l’indique, les candidats sont soumis à des dilemmes. Audiences passable, procès en veux tu en voilà avec Endemol (parce que copier Secret Story ce n’est pas bien M’dame Joubert), W9 finit la saison et jette le doss’ dans la déchiqueteuse. Plus récemment, NRJ12 relance la Star Academy. Alors que TF1 sortait l’argent directement des tiroirs-caisses, NRJ12 racle le moindre centime et économise sur le moindre petit technicien / styliste / coiffeur / balayeur et lance une émission cheap et sommes toutes, ratée : candidats inaudibles, plateau dépassé : les audiences des primes sont convenables mais pas brillantes, et les quotidiennes s’effondrent. Ni une ni deux, à la fin de la saison, NRJ12 abandonne. Endemol, pas content, cherche un autre diffuseur, en vain, l’émission est bien trop chère, et probablement dépassée face à une Nouvelle Star puissante sur la 8 et à un The Voice rayonnant….

La téléréalité d’enfermement semble avoir fait son temps dans le paysage audiovisuel français. Même si Secret Story résiste encore et toujours aux envahisseurs que sont Les Anges et autres émissions qui emmènent des candidats à l’étranger. Les programmes d’enfermement finiront-ils par s’éteindre d’eux même ? Ce qui est certain c’est qu’Endemol devra renouveler son format Secret Story pour le faire perdurer.

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